Guerre des nerfs à Buffalo

Il y a quelques semaines, Kim et Terry Pegula, le couple propriétaire de la franchise des Buffalo Bills, ont fait part de leur volonté de transférer leur équipe si la possibilité d’édifier un nouveau stade pour remplacer l’actuel Highmark Stadium, jugé vétuste s’avérait impossible. Les Pegula sont sous pression. Les administrateurs de la NFL et les propriétaires dont une grande partie est une bande de terroristes avec comme figure de proue le propriétaire des Dallas Cowboys ont jugé qu’il est temps de changer les choses à Buffalo.

L’entrepreneur

Terry Pegula, né en 1951, travaille en tant qu’employé dans le secteur pétrolier. Après quelques années, Pegula fonde sa petite entreprise. Il obtient un prêt pour faire des forages après avoir obtenu une concession. Pegula est rapidement récompensé en mettant la main sur du gaz naturel. Dès lors, il ne cesse de développer sa société avec succès en matière de forage. En fonction de cette réussite, Pegula s’intéresse au sport professionnel et commence à investir dans des franchises qui évoluent dans des ligues mineures.

En 2010, Pegula réalise sa première grosse transaction en faisant l’acquisition de la franchise de NHL des Buffalo Sabres pour 150 millions. Quatre années plus tard, suite au décès de Ralph Wilson, il se positionne pour acheter les Buffalo Bills, car les héritiers de Wilson ne veulent pas conserver la franchise. Entre temps, Pegula cède l’ensemble de sa société gazière à la Royal Dutch Shell pour 4,7 milliard.

Si la cession semble en bonne voie, le businessman Donald Trump ainsi que le groupe musical Bon Jovi se lancent dans la course pour acheter les Bills. Dès lors les candidats dévoilent leur programme. Leur priorité est de faire des Bills la meilleure équipe possible. La construction d’un nouveau stade où la rénovation du Highmark Stadium est aussi évoquée. Finalement, les gens de la NFL tranchent en faveur de Pegula qui débloque la somme de 1,4 milliard. L’antagonisme qui existe depuis des années entre les gens de la NFL et Donald Trump qui avait une offre de 900 M$ a été déterminant.

Les Buffalo Bills

Les Buffalo Bills sont nés suite à la création de l’AFL, la petite ligue qui au milieu des années soixante voulait rivaliser avec la puissante NFL. Avec la fusion des deux ligues qui intervint en 1971, les Bills intègrent la conférence américaine. Au même moment, Ralph Wilson le fondateur de la franchise lance le projet de la construction d’un grand stade.

Quelques années plus tard, les Bills s’installent dans leur nouvel écrin et l’arène fait rapidement le plein, quels que soient les résultats. Buffalo est un des cinq meilleurs publics de la NFL. Des fanatiques qui supportent leurs joueurs par n’importe quel temps dans la victoire comme dans la défaite.

Au tout début des années quatre-vingt-dix, les Buffalo Bills font le spectacle. Après une suite de rencontres héroïques dont le fameux come-back face au Houston Oilers en play-off, les Bills remportent leur division à plusieurs reprises, ils raflent quatre AFC d’affilée, néanmoins, ils s’inclinent à chaque fois en finale du Super Bowl. Peu importe ses défaites, joueurs et coaches sont toujours adulés et font partie intégrante de la famille, la maison des Bills.

Vu le contexte et comment les choses fonctionnent du côté des chutes de Niagara, certains spécialistes se sont posé la question de savoir si Pegula avait compris ou il avait posé les pieds ?

Une chose est acquise, Pegula ne s’est pas montré hostile aux diverses remarques désobligeantes faites par certains propriétaires au sujet de la situation des Buffalo Bills. Quand on siège à la table des trente-deux propriétaires de clubs, on adhère à la politique globale initiée et dictée par quelques-uns, car c’est de cette manière que fonctionne la NFL. Jadis, les propriétaires de franchises étaient gens de la profession ou de grands passionnés, maintenant, il s’agit d’investisseurs voraces et acculturés qui recherche une visibilité médiatique.

Construction ou rénovation

C’est la question qui agite Buffalo et ses environs. On comprend aisément la volonté des gens de la NFL de voir un nouveau stade à la place de l’actuel Rich stadium. L’actuel Rich Stadium rebaptiser de son sponsor Highmark Stadium n’est en rien une arène vétuste. Construit en 1973, c’est une arène au dessin classique, en rien obsolète. Certes, l’ensemble du stade a besoin d’être rénové et amélioré dans certains secteurs, mais de là à être rasé pour laisser place à autre chose, il y a de quoi s’interroger.

Répartition

Quand on analyse la situation de la franchise de Buffalo, on se demande ce qui peut retenir Pegula de construire son propre stade ou bien de racheter le Highmark Stadium et d’y entreprendre les travaux nécessaires pour en faire une arène plus conforme aux standards de la NFL. Pegula a largement les moyens de couvrir l’opération, sans parler des sommes considérables qu’amassent les propriétaires de clubs chaque année. On rentre là, dans une entreprise où se mêlent convoitise, corruption, réseaux d’intérêt, etc…

 

Mille-feuille

L’utilisation et la répartition des coûts d’exploitation d’un stade ont toujours été un souci pour les propriétaires de franchises de la NFL. Hormis Green Bay qui se lance dans la construction de son outil de travail à la fin des années cinquante, il faut attendre une dizaine d’années pour que des initiatives similaires naissent en NFL. En, 1971, la franchise des Dallas Cowboys inaugure sa propre enceinte, néanmoins, la plupart des patrons de la NFL à l’image de Green Bay optent pour un partenariat.

État fédéral, municipalité, comté, et franchise sont sollicités pour participer à l’édification d’arènes modernes. Chaque propriétaire de club propose une formule en fonction du contexte politique et économique du moment. Ainsi à travers ce type de montage financier, les propriétaires de franchises ont fait appel à l’argent public.

Si la formule fut valable durant un temps, les choses ont évolués. Les années 2000 ont été émaillées par plus d’un conflit entre les gens de la NFL et les citoyens sollicités de toute part dans certaines agglomérations pour financer les rêves de grandeurs d’une clique de preneurs d’otages. Soit vous alignez l’argent, soit la franchise déménage dans une autre ville. C’est l’argument que Pegula a lancé aux élus de la cité de Buffalo.

La riposte a été immédiate, et l’actuel patron des Bills et les gens de la NFL ont rapidement battu en retraite. Récemment, la NFL a signé un accord, s’évitant un procès monstre à terme avec la ville de St Louis suite au départ précipité des Rams vers Los Angeles pour la modique somme de 800 millions.

Les tickets de match des Bills sont parmi les plus bas de la NFL, comptés tout de même entre 50 et 80 dollars. Des loges, des billets de match élevés et réductions du public issu des classes populaires, on comprend ou les gens de la NFL veulent en venir, décidément…

En attendant, les fans de Buffalo ne veulent pas entendre parler d’une nouvelle arène à l’image de ce qui s’est fait à Minneapolis, Las Vegas et Los Angeles.

À Buffalo, on aime les conditions difficiles. Comme à Cleveland et Green Bay, on vit pour un football authentique pur et dur. Aux dernières nouvelles suite aux multiples tractations menées entre tous les protagonistes sollicités par la rénovation ou la construction d’un nouveau stade, le budget  a été fixé aux alentours de 1,4 milliard. Certes, le coût pour la réalisation du projet est élevé, toutefois, on est éloigné des sommes folles dépensé à Las Vegas et Los Angeles. La matrice code-barres ne s’est toujours pas arrêtée à Buffalo…