Molitor
Bien que la piscine de Molitor ait été réhabilitée depuis une quinzaine d’années, son histoire renvoie immanquablement au Paris des années trente et à l’après-guerre. Molitor est un complexe nautique construit à la lisière du bois de Boulogne, proche du stade Roland-Garros et du Parc des Princes, dans le 16e arrondissement de Paris.
Dessinée par l’architecte Lucien Pollet, elle est inaugurée en 1929 par les nageurs médaillés olympiques nord-américains, Aileen Riggin Soule et Johnny Weissmuller, le futur Tarzan de la MGM, l’édifice est une expression de son temps. Le paquebot blanc, surnom du bâtiment, est doté de multiples décorations de style Art Déco. Il devient un lieu de rencontre et de détente pour la classe possédante et les acteurs du monde culturel.
Le complexe est composé de deux bassins distincts. Le premier est d’une longueur de 33 mètres, ceinturé par deux niveaux, la piscine est couverte avec une toiture de type translucide. Le deuxième bassin est d’une longueur de 50 mètres. L’ensemble est à l’air libre, le tout cerclé par trois niveaux de cabines. L’édifice abrite des commerces, une salle de culture physique, un café-tabac et un restaurant.
Après des décennies d’activités, la fréquentation du complexe, par manque d’attractivité et d’entretien, décline. Vers la fin des années quatre-vingt, la sanction tombe. Molitor ferme ses portes. Face à la menace d’un projet immobilier qui prévoit de raser le complexe, une association de défense de Molitor est fondée et réussie à le bloquer.
Durant des années, Molitor subit les ravages du temps. Fermer, inoccupé, l’édifice est laissé à l’abandon. Molitor n’échappe pas au pillage et à l’antimatière qui se déverse sur chaque recoin de ses murs, fruit des mains de tagueurs. Après une quinzaine d’années à se dégrader, l’ancien complexe nautique, suscite l’intérêt de certains milieux économiques. Plusieurs projets émergent. En 2008, la mairie de Paris annonce que c’est le dessin proposé par Colony Capital-Accor-Bouygues qui l’emporte, le tout pour un montant de 65 millions d’euros. La rénovation complète de l’édifice est confiée aux architectes Alain Derbesse, Alain-Charles Perrot et Jacques Rougerie.
En fonction de l’état de faiblesse de l’ensemble de l’édifice, le gros du bâtiment est démoli. Une nouvelle construction qui ressemble le mieux possible à l’ancienne est réalisé. Six ans après le projet voté, Molitor rouvre ses portes…
Mauvaises polémiques
Dès la réouverture du complexe nautique de Molitor, des voies se sont fait entendre, soulignant le caractère contraire de la nouvelle construction au dessin initial.
En architecture, la réhabilitation d’un bâtiment de grande envergure ayant une histoire riche, telle que Molitor, est la chose la plus compliquée à mettre en œuvre. Outre le fait de respecter l’œuvre du concepteur d’origine, il s’agit de redonner vie à un édifice, en ajoutant de nouvelles commodités. Les rénovateurs sont sur le fil du rasoir.
Le rajout d’une construction aux parois de verre fumé qui contraste avec la façade art déco semble écraser la partie d’origine. Néanmoins, cette nouvelle construction a ses défauts et ses avantages. L’ajout d’un hôtel de luxe cinq étoiles, deux restaurants, un spa et une salle de sport, permet à Molitor de mieux vivre…
C’est sur cet aspect que les architectes en charge de rénové Molitor ont travaillé le mieux possible. Si on prend le nombre de rénovations faites à travers le monde d’enceintes sportives, sans aller dans d’autres domaines, que l’on compare avec des reconstructions ratées, on peut sans faire la fine bouche affirmer que le nouveau Molitor est assez réussi dans l’ensemble. On est loin du vandalisme que certains craignaient. La réalisation finale ne s’oppose pas à son glorieux passé.