The Artist
Je ne sais combien de fois, j’ai entendu cette litanie, “Mais pourquoi Matthew Le Tissier n’a jamais jouer dans un club huppé ?”. La réponse est fort simple. L’attaquant anglais du club de Southampton n’était pas pourvu d’une condition physique lui permettant de performer chez les clubs de l’élite.
Né à Guernesey, Le Tissier joue au football dès son plus jeune âge. Une ile comme Guernesey est un endroit propice pour taper dans la balle un peu partout et forger une relation naturelle avec la balle. Membre du club Val Recréation, il s’amuse sans se soucier d’une éventuelle carrière chez les professionnels.
À l’âge de quinze ans, Le Tissier présente des caractéristiques intéressantes. Créatif, tacticien, technique, c’est un phénomène contenu dans un physique quelconque. Il tente sa chance hors de son ile au club d’Oxford United où il est recalé. Puis, il réussit à percer la porte des équipes de jeunes de Southampton. Dès lors, Le Tissier devient un joueur indispensable au club rouge et blanc et un phénomène sur le petit écran.
Si les téléspectateurs britanniques et amateurs de football étaient essentiellement focalisés sur les grosses affiches du championnat, ils n’oubliaient jamais d’observer un instant ce que faisait le club de Southampton et son joueur peu ordinaire.
Le Tissier n’a jamais été un excellent joueur. Avec le natif de Guernesey, il faut parler d’un artiste.
Durant ses années d’activité au sein de la ligue de football anglaise, Le Tissier n’a jamais eu de joueur égal à son talent alors que le championnat anglais regorgeait de joueurs starifiés par la masse médiatique. Pas de regrets, doté d’un métabolisme avantageux, la vedette de Southampton n’aurait jamais pu se fondre dans un effectif d’un top club.
Le Tissier évoluait à un tout autre niveau par rapport à ses contemporains, d’où son échec en sélection nationale. On ne mélange pas le talent pur avec l’intelligence artificielle. Enfin, si Le Tissier avait été un athlète, il n’aurait rien accompli de tangible sur un terrain de football, toute sa construction en aurait été altérée pour aboutir à un joueur basique.
Le Tissier avait cette faculté de voir et sentir avant ses coéquipiers et adversaire le jeu. Action avortée, ou aboutissant à un coup de pied arrêté ou bien à un but, Le Tissier possédait un sens du jeu aiguisé. Dès qu’il était en situation de créer, le Dell, l’antre du club de Southampton se mettait debout pour accompagner l’artiste en pleine représentation…
Le talent, le vrai, ne s’achète pas. Il ne se fabrique pas dans des centres de formation et encore moins dans les médias, sur internet et dans les agences de publicité.
De nos jours, dans un football professionnel voué aux échanges et à la représentation sur le terrain, Le Tissier serait automatiquement recalé par les techniciens de l’ensemble des centres de formation des clubs du Royaume-Uni.
La presse britannique a toujours minoré le talent de Le Tissier. Exit le talent réel, place aux médiocres, infantilisés, robotisés, obéissants à tous les codes promulgués par l’ordre établi.
Le Tissier reste, à ce jour, le dernier joueur d’une race éteinte de l’autre côté du Channel …