Le tennis s’habille
Les années soixante-dix sont un bouleversement dans l’histoire du tennis. Outre l’ère Open, apparaissent une professionnalisation plus grande en matière de préparation des joueurs, les grands tournois sont retransmis à la télévision et l’aspect esthétique est aussi l’objet d’une évolution importante. Fini le fait de jouer tout en blanc, excepté à Wimbledon. Les joueurs arborent désormais de multiples couleurs.
À cette époque, quelques griffes habillent l’ensemble des professionnels, homme et femme, du circuit ATP. Lacoste, Fred Perry, Slazenger, pour les plus connus. C’est le moment où de nouvelle marque apparaissent sur les courts de tennis. Adidas tout d’abord qui tente une percée sur ce marché après avoir ratissé le monde du football. On note la présence d’autres marques dont la durée de vie sur le circuit ATP s’avère éphémère. Enfin, deux équipementiers italiens se fondent au milieu de la masse. Fila et Sergio Tacchini.
La première est une enseigne très ancienne dans le domaine de l’habillement des sportifs, cependant le tennis est une première pour les gens de Fila, quant à Tacchini, elle est l’œuvre d’un ancien joueur de tennis italien spécialiste du double dans les années soixante. Tacchini inspiré par l’odyssée de Fred Perry, une fois son retrait des courts, s’est lancé dans l’aventure en créant sa société.
Adriano Panatta est le premier joueur qui popularise le T majuscule de Tacchini. Fila attire dans ses filets deux joueurs peu connus, Björn Borg et Guillermo Villas. Pour Fila, c’est le début de la grande aventure. Tacchini griffe Jimmy Connors une seule saison, néanmoins l’habilleur transalpin qui vise le marché nord-américain signe Roscoe Tanner. Bien plus tard, une pléiade de tête d’affiche du circuit dont Vitas Gerualitis, Gene Mayer, Brian Gottfried, Jimmy Arias et John McEnroe rejoignent l’écurie Tacchini. En une décennie, les deux équipementiers italiens ont redynamisé le secteur du sportwear…
L’influenceur
Cette évolution soudaine et rapide dans le monde du tennis ne s’est pas faite sans le concours de certains intervenants. Le grand couturier Oleg Cassini n’y est pas étranger..
Né à Paris EN 1913 de parent russe et italien, le jeune Cassini rentre en Russie, puis ses parents immigrent en Italie du fait de la guerre civile qui couve dans le pays. La famille Loiewski s’installe à Florence. Le père d’Oleg est un aristocrate et une connaissance appréciée du Tsar Nicolas II. Sa mère est issue de la noblesse transalpine. Bien qu’en partie ruinée, elle ouvre une maison de couture à Florence qui connait le succès. C’est dans cette atmosphère qu’Oleg et son frère Igor grandissent.
Adolescent, le jeune Oleg est fasciné par le tennis. Il entraine son frère avec lui et s’entraine avec ardeur. Il ne parvient pas à se hisser au niveau des meilleurs bien qu’il remporte un titre national en catégorie junior, mais son habileté au tennis lui permet de côtoyer le grand monde dans les tennis club. Il joue au football et pratique l’athlétisme. La crise de Wall Street ayant fortement impacté l’affaire familiale, les deux frères décident d’immigrer aux États-Unis et choisissent le patronyme de leur mère. En tant que russe blanc, Cassini n’ignore pas que New York abrite des gens issue de la banque qui ont plus que contribuer à détruire son pays en financent la révolution bolchevique.
En adhérant au tennis club de West Side à New York et celui de Beverly Hills en Californie, le jeune Oleg côtoie des gens importants, ceux qui sévissent dans l’industrie du cinéma, notamment. L’agent Ray Stark le prend sous son aile et les portes des studios s’ouvrent à lui. La suite est connue, Cassini devient le couturier le plus prisé de Hollywood au côté d’Edith Head, la créatrice des costumes à la Paramount. « Avec une raquette de tennis et un smoking, tu pourras aller partout dans la vie ». Le jeune Cassini n’a jamais oublié cette phrase de sa mère.
À l’orée des années soixante, il travaille sur des évolutions portant sur les tenus des joueurs et joueuses de tennis. Dix ans plus tard, il s’attaque à la représentation classique qui caractéristique l’habillement des professionnels de la balle jaune. Le blanc. Cassini n’est pas un révolutionnaire, néanmoins, il considère l’ensemble des tenues porté par les stars de la balle jaune comme trop terne.
Dès lors, il s’exhibe dans les tournois pour célébrité en arborant des tenues avec polo et short de couleur verte, bleu, rouge et jaune. Il alterne les tons sans pour autant rejeter le blanc et fonde un club de tennis. Sur cette entrefaite, certains équipementiers se lancent dans cette idée, En 1972, le roumain Ilie Nastase devient le premier joueur à s’imposer dans un grand chelem. Il porte un polo bleu griffé Fred Perry…